Prof. Dr. Moez Ouni 22 janv. 2019 11:33:04

De quelles questions fondamentales traitent les économistes?

Economie

Quelles sont les questions fondamentales des sciences économiques ? Découvrez notre article, écrit par le Professeur Moez Ouni.

 

Les questions fondamentales des sciences économiques

D’après l’observation, nous constatons deux réalités qui sont à la base des fondements de la science économique. La première réalité est la rareté des ressources (ou dit d’une autre manière : les ressources sont limitées). La deuxième réalité porte sur le comportement de l’humain. Ses besoins sont illimités.

Les sciences économiques s’efforcent d’administrer ces ressources rares afin de satisfaire les différents besoins. De ces deux réalités se dégage le problème économique fondamental. Ce dernier consiste à déterminer comment la société doit résoudre le conflit naissant entre d’un côté des ressources limitées et de l’autre côté des besoins humains illimités. Schématiquement, le problème économique fondamental se présente ainsi :

 

D’après ce schéma, les sciences économiques vont étudier plusieurs questions fondamentales, compte tenu de la rareté des ressources :

  1. Qu’est-ce que la société décide de produire ? C’est la question : que produire ? (de ceci découle la question : combien produire ?) ; la société doit faire des choix alternatifs, car la quantité de ressources utilisées pour produire un bien prive d’autres biens d’être produits.
  2. Comment la production devrait-elle s’organiser ? C’est la question comment produire ? (Une question qui découle de celle-ci : où produire ?) ; quels procédés, quelles technologies, quelles organisations, etc.
  3. Comment la production est-elle répartie? C’est la question pour qui produire? Autrement dit quelle partie de la population (consommateurs) cibler.

A ces différentes questions, les économistes ont essayé d’apporter des réponses. Il existe deux grands types de réponses et donc deux visions du monde économique basées sur un ensemble de fondements théoriques et idéologiques.

Une troisième voie s’est mise en place historiquement qui se trouve à mi-chemin entre les deux visions, c’est l’économie sociale de marché. Les deux réponses sont :

 

1. L’économie centralisée (planifiée)

Cette réponse a trouvé son application dans le bloc des pays de l’Est et en URSS à l’époque. Les décisions y sont prises par le planificateur central (l’Etat), qui apporte des réponses aux questions posées ci-dessus. Les décisions sont intégrées dans le cadre d’un plan de la production et de la consommation. Elles sont ensuite imposées à la collectivité (producteurs et consommateurs). L’économie planifiée est caractérisée par :

  • La priorité est donnée à la collectivité, l’individu ne compte pas trop à côté de la communauté.
  • La propriété des facteurs de production (les terrains, les équipements, ...) est collective, donc pas de propriété privée de ceux-ci.
  • La liberté d’entreprise est inexistante.
  • La réponse à toutes les questions est donnée par le planificateur (l’Etat).
  • La répartition des revenus se fait selon les besoins de chaque participant.

2. L’économie décentralisée (économie de marché)

Dans cette vision, les décisions sont individuelles (émanent des ménages et des entreprises). Les producteurs et les consommateurs orientent l’utilisation des ressources disponibles, la production et la répartition des biens et services.

Ces décisions individuelles (de production et de consommation) se traduisent par des offres et des demandes sur différents marchés où les prix qui se forment reflètent l’interaction des décisions individuelles (offre et demande). L’économie décentralisée (ou de marché) est caractérisée par :

  • La priorité est donnée à l’individu : jouissance d’un large ensemble de droits et de liberté d’action assez importante.
  • L’Etat ne joue qu’un rôle secondaire (main invisible).
  • La propriété des facteurs de production privée est garantie et protégée par un arsenal de lois.
  • La liberté d’entreprise est garantie.
  • La réponse à toutes les questions est donnée par les mécanismes de marché.
  • La répartition des revenus se fait selon la participation et les capacités de chaque acteur économique.

3. L’économie sociale de marché (économie mixte)

Dans la réalité et historiquement, l’économie de marché pure n’a jamais existé. Ses principes fondamentaux n’ont jamais été appliqués. Les gouvernements intervenaient de plus en plus dans les affaires économiques afin de lutter contre plusieurs problèmes. Ces interventions sont le plus souvent sous deux formes :

  • Légiférer et émettre des règles et des lois (pouvoir de législation) pour réguler et organiser le fonctionnement des économies, et limiter les tendances aux abus de certains acteurs économiques.
  • Pratiquer des politiques économiques (politique budgétaire, politique fiscale, politique environnementale, politique monétaire, ...) dans le but de maîtriser et stabiliser les économies et leur fonctionnement et permettre une plus grande équité sociale.

Exemples d’intervention de l’Etat dans les affaires économiques :

  • Politique fiscale (impôts et taxes).
  • Politique monétaire (gestion de la monnaie dans l’économie).
  • Politique budgétaire (gestion des dépenses).
  • Soutien de certaines activités (culturelles, sportives, ...) par les subventions.
  • Législation en matière de concurrence (interdiction des cartels, des abus, ...).
  • Législation en matière environnementale (taxe sur le CO2, les émissions de polluants, ...).
  • Les produits non marchands (armée, police, ...)
  • etc.

Economie sociale de marché : forme d’organisation de l’économie, où le marché jour un rôle important. En revanche, l’Etat intervient pour orienter, réguler le fonctionnement des activités économiques et corriger les échecs du marché.

 

Le rôle de l’Etat dans l’économie

Selon l’économiste américain Musgrave (1959), on peut regrouper les fonctions de l’Etat en trois fonctions fondamentales : la fonction d’allocation (d’affectation) des ressources, la fonction de redistribution et la fonction de stabilisation. Ces fonctions sont interdépendantes. Nous présentons une brève discussion sur ces trois fonctions.

a) La fonction d’allocation

L’Etat intervient pour modifier l’allocation des ressources car l’allocation par les mécanismes du marché n’est pas toujours optimale. Cette fonction traduit l’intervention de l’Etat par :

  • Les réglementations destinées à organiser l’activité économique du secteur privé (par exemple le secteur des assurances). La politique fiscale peut aussi être utilisée pour allouer des ressources (selon l’adage, prendre aux riches pour donner aux pauvres).
  • La production de biens et services publics que le marché ne peut pas fournir d’une manière optimale ou qui satisfait la collectivité (exemple : l’armée, la police, ...).

b) La fonction de redistribution

Par nature, l’économie de marché crée de l’inégalité sociale ; l’Etat intervient pour réduire l’excès d’inégalité. La fonction de redistribution vise l’équité dans la distribution des revenus et de la richesse dans le pays. L’intervention de l’Etat se fait à travers :

  • Les prélèvements sous forme d’impôts (politique fiscale) et la redistribution sous forme de transferts (politique de dépenses publiques). Ces transferts sont de deux natures : économiques (subventions aux entreprises) et sociaux (aides sociales, bourses d’études, aides aux handicapés, ...).
  • ─  La réglementation qui permet de redistribuer la richesse et favoriser ceux qui sont les moins lotis (exemple : salaire minimum).

c) La fonction de stabilisation

Étant donné que l’économie est en mouvement perpétuel, que la situation économique fluctue et que l’environnement est changeant, l’Etat se trouve dans l’obligation, pour maintenir une stabilité favorable aux affaires et éviter les déséquilibres économiques (chômage, inflation, déséquilibre de la balance commerciale ou des paiements), d’intervenir. Pour parvenir à cet objectif, l’Etat utilise les moyens suivants  :

  • A l’aide de la politique budgétaire et fiscale, l’Etat peut contrer les effets négatifs de la conjoncture économique (une politique budgétaire expansive, basée sur l’augmentation des dépenses publiques, peut relancer les affaires économiques ou bien empêcher que l’économie tombe en récession).
  • Avec la politique monétaire, l’Etat peut aussi contrer les effets négatifs dus à des déséquilibres comme l’inflation, la dégradation des taux de change, ...

Quelques problèmes économiques à étudier

Les questions fondamentales posées ci-dessus et les deux grands types de réponses qui y sont associés soulèvent un grand nombre de problèmes qui forment la matière de l’économie politique, notamment :

  • Le fonctionnement des marchés des biens et services, les marchés financiers, le taux d’intérêt et l’évolution des cours des actifs financiers.
  • Le comportement des producteurs et des consommateurs, les décisions en matière de consommation (d’épargne) et de production.
  • L’évolution des différentes variables économiques dans le temps, les cycles d’activité.
  • La croissance économique, le développement économique.
  • L’activité commerciale et la finance internationale, les taux de change.
  • Le rôle de l’Etat et de la politique économique.
  • Le chômage, l’inflation, la monnaie.
  • etc.

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Prof. Dr. Moez Ouni

Diplômé en informatique de gestion de l’Université de Tunis en 1987, Moez Ouni poursuit ses études avec une Licence ès sciences économiques, option économie politique à l’Université de Neuchâtel en Suisse en 1998. Il complète son cursus avec un Master en économie et finance de l’Université de Genève en 2000. Moez Ouni a été chargé de cours d’économie politique à la Formation universitaire à distance (FUAD). Aujourd’hui, il enseigne l’économie et la gestion d’entreprise dans les hautes écoles spécialisées, tout en étant consultant et collaborateur scientifique à Eco’Diagnostic et l’Université de Neuchâtel. Il a développé ses compétences et s’est spécialisé dans les domaines de l’application de méthodes quantitatives en socio-économie, l’interaction entre l’économie et la sphère financière, et les études d’impact socio-économique. Il maîtrise l’anglais et l’arabe. Doctorat ès sciences économiques de l’Université de Neuchâtel en 2011