Le cabinet de recrutement Robert Half a réalisé une étude en 2018, qui porte sur l’ennui des salariés au travail. Cette étude a révélé que 25% des managers estiment que leurs subordonnés ne s’ennuient jamais au bureau. Ces résultats ont été contrés par ceux de l’enquête Le bore-out syndrome, réalisée par le spécialiste de la gestion du travail Christian Bourion.
D’après cette enquête, au moins 30% des employés souffrent d’ennui dans leur emploi. Plusieurs raisons peuvent être derrière ce constat notamment : l’exécution de tâches peu valorisantes ou répétitives ou encore un manque de motivation et d’estime de soi et donc de l’apathie. Cette dernière se manifeste sous différentes formes.
Symptômes de l’apathie au travail
Désintérêt et absence d’émotion
D’après Peter Werder qui est l’auteur de Diagnosis Boreout, l’apathie se manifeste à travers un désir de travail accompagné d’une inaptitude à le traduire en acte. Et c’est ce qui génère une souffrance chez le salarié sujet au syndrome d’épuisement professionnel.
D’ailleurs le terme apathie trouve son origine dans apatheia, un mot grec qui signifie l’absence de passion ou encore le manque de sensibilité émotionnelle. Le plus souvent il y a une confusion entre ce terme et la paresse ou la dépression, au moment où il s’agit en fait d’une baisse de motivation qui se traduit par du désintérêt et de l’indifférence.
D’un autre côté, la motivation représente l’énergie qui pousse une personne à l’action. Or pour un salarié apathique, il devient difficile d’exécuter des tâches planifiées ou de prendre des décisions.
Détection et mesure de l’apathie
Carl Gustav Jung, psychiatre, estime que les émotions sont indispensables pour la transformation des ténèbres en lumière et l’apathie en mouvement. Quant à Robert Marin de l'Université de Pittsburgh, il présente trois typologies de symptômes, indiquant l’apathie au travail. Il s’agit de :
- la diminution du comportement intentionnel : ceci se manifeste par la baisse des efforts fournis mais aussi du temps réservé à des activités et des tâches quotidiennes requérant de l’initiative et de la persévérance. Evidemment un tel constat s’accompagne d’une dépendance d’autrui pour la structuration des différentes activités.
- la diminution des activités cognitives intentionnelles : une telle chose se traduit par un manque d’intérêt ou d’envie pour l’apprentissage ou l’expérimentation de nouvelles choses. Et dans ce cas le salarié ne se préoccupe pas de la socialisation.
- l’affaiblissement des émotions liées au comportement intentionnel : c’est le manque de réactivité émotionnelle à tout ce qui se déroule que ce soit positif ou négatif.
La détection de l’apathie se fait par des outils précis à l’instar de l’échelle apathique, mise en place par Sockeel et Dujardin, et qu’on appelle aussi LARS. Cet outil contient une trentaine de questions, se rapportant au type des activités journalières et leur fréquence, la réalisation des tâches de son initiative personnelle ou sous la contrainte, l’essai d’autres solutions en cas d’échec, l’expression de son opinion pendant les discussions ou l’adoption des avis d’autrui et l’expression du regret en cas d’attitude désagréable vis-à-vis de quelqu’un.
Le désintérêt et la démotivation ont plusieurs causes notamment les échecs répétés ou encore le rejet et le rabaissement subis par les autres. En établissant un diagnostic des causes, on peut dresser un plan d’action à adopter pour apporter du changement et retrouver son élan vital.
Culture de la motivation et de l’autodétermination pour échapper à l’apathie
L’augmentation de la dopamine
Après une journée de travail particulièrement productive, on ressent de la satisfaction et de la fierté. Cette sensation est associée à la dopamine, l’hormone du plaisir qui s'accumule dans le corps pendant l’effort avant d’être libérée à la fin. En anticipant la récompense, cette substance est libérée partiellement et c’est ce qui permet d’entretenir la motivation. Dès lors pour vaincre l’apathie, il suffit de s’accorder une récompense et se faire plaisir. Toute diminution de cette hormone se traduit par le manque d’entrain, la procrastination et le doute.
Heureusement, il est toujours possible d’inciter le corps à en sécréter à travers :
- la décomposition du travail en petites tâches comme le préconisent les spécialistes. Pour la rédaction d’un article par exemple, il faut effectuer des recherches et de la documentation, mettre en place une structure pour la rédaction, trouver un titre évocateur, produire le contenu de l’article et enfin procéder à la relecture. Evidemment il convient de prévoir une échéance à respecter pour ce travail et qui doit être réaliste et réalisable.
- la célébration des réalisations, même les plus petites, est importante. Il ne faut pas hésiter à se complimenter d’avoir respecté les deadlines fixées pour la réalisation du travail et de s’être acquitté du travail correctement.
- le sens des tâches accomplies permet de retrouver sa confiance en soi. Ainsi un rédacteur peut se dire qu’il écrit ses articles pour partager des informations avec les autres, tout en faisant preuve de créativité.
L’autodétermination
L’autodétermination s’appuie sur la capacité d’une personne et son attitude qui lui donnent la possibilité d’agir sur sa vie et de décider sans subir l’influence des autres. La motivation peut être retrouvée grâce à des attitudes et des comportements autodéterminés. Comme le disait Nelson Mandela :
« Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends».
Le changement des sentiments peut s’opérer à travers la pensée, d’où la nécessité d’observer la fréquence des pensées négatives, pour les substituer par d’autres plus positives. Au lieu de se dire qu’il n’est guère nécessaire de tenter quelque chose car on risque l’échec, il vaut mieux penser que soit on réussit soit on apprend de l’expérience. Il est important de s’encourager et de se féliciter de la réalisation d’un travail. Il ne faut pas attendre de récompense des autres, il vaut mieux saisir cette opportunité pour réviser sa perception de soi. Parfois on se juge trop sévèrement sans aucune raison. On dit que le chemin de 100 miles commence par un pas et c’est toujours vrai.
Pour une personne qui souhaite faire du sport mais qui se sent découragée rien que par la pensée des efforts à fournir, il vaut mieux commencer par quelques étirements ou un peu de marche dans les alentours. Il ne faut pas oublier que l’exercice physique libère les bêtas-endorphines dans le sang, ce qui génère une certaine euphorie et une sensation de bien-être. Pour renforcer son autodétermination, il faut chercher à se dépasser. Il est possible par exemple de demander une charge de travail plus importante à son supérieur hiérarchique ou de participer à des projets et des initiatives de groupe.
D’un autre côté il ne faut pas se replier sur soi et souffrir en silence. Il est préférable de communiquer avec ses collègues et son manager qui peuvent constituer un réel soutien et apporter une aide considérable. Le fait de dire les choses à haute voix permet de se responsabiliser envers soi-même et envers les objectifs à réaliser.
Accompagnement empathique pour une personne démotivée - Soutien d’un collègue apathique
La méconnaissance des aptitudes et des compétences de chaque collaborateur peut être source d’apathie. C’est cette absence d’écoute qui est à la base du problème. En général, l’apathie est souvent confondue avec de la paresse pour ceux qui ne connaissent pas le problème de l’intérieur. Il faut savoir observer et écouter un collègue démotivé. La démarche à suivre est simple et efficace, il suffit de saisir un moment où il est seul pour lui faire part des inquiétudes à son égard mais sans trop verser dans le drame. Il faut l’écouter et lui réserver le temps nécessaire pour le laisser s’épancher.
En général les personnes apathiques se mettent souvent sur la défensive, dès lors il ne faut pas forcer la discussion. Il serait judicieux de l’impliquer dans des activités ou des projets, mais sans se montrer exigeant. Il faut l’encourager et lui faire un retour positif. Il vaut mieux ne pas le brusquer s’il n’est pas réactif. Ceci ne signifie aucunement qu’il ne profite pas de l’activité, il faut juste lui accorder du temps.
Interaction empathique du supérieur hiérarchique
La performance des employés est liée impérativement à leur bonheur. C’est pourquoi, il est primordial de contrer la baisse de motivation avec de la positivité. L’attitude du manager face à un collaborateur apathique est cruciale, il doit communiquer de manière empathique et l’interaction ne sera que plus efficace. En effet il doit faire preuve de compréhension des émotions de son collaborateur et les accepter, même s’il ne les partage pas. Et comme le dit si bien l’écrivain Jean-Pierre Otte :
« C’est seulement dans l’effacement de soi, que l’on peut, par empathie, percevoir la réalité de l’autre ».
En vue de remporter la lutte contre l’apathie, il faut que le manager détermine avec précision l’origine du problème. Ensuite en se mettant dans la peau de la personne concernée, il lui propose un accompagnement personnalisé en l’écoutant et le comprenant. Par la suite, il doit impliquer l’ensemble de son équipe pour une projection future tournée vers des objectifs concrets à réaliser. C’est un moyen efficace pour responsabiliser tout un chacun.
Un bon manager doit réserver un petit moment à un chacun pour le complimenter sur ses points forts et lui indiquer les points à développer tout en restant à son écoute et en l’encourageant à émettre ses propres remarques. Il doit aussi déléguer quelques tâches valorisantes au collaborateur qui a du potentiel, tout en analysant ce qui peut le motiver. Il est utile de prévoir un système de récompense pour encourager les efforts et les réussites, même lorsqu’il s’agit de tâches minimes.
Il est primordial de ne pas se focaliser sur les mêmes personnes car chacun doit être valorisé et estimé pour son travail et ses accomplissements. Un manager doit apporter un soutien aux personnes qui rencontrent des difficultés, en exprimant son empathie et en veillant à favoriser l’intelligence collective.
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