Christophe Rieder 24 déc. 2018 09:00:03

Fiscalité des personnes physiques : les contribuables fortunés font preuve de mobilité

Fiscalité

La fiscalité est un élément important à considérer pour établir son domicile fiscal s'agissant d'une personne physique, ou son siège social s'agissant de son entreprise. Cela est d'autant plus important à prendre en compte au niveau de l'imposition des personnes physiques fortunées. Les riches contribuables raisonnent de façon similaire aux entreprises et n'hésitent pas à changer de domicile fiscal pour réduire l'impact de l'impôt sur le revenu et la fortune.

Quelles sont les raisons de l’exode de contribuables fortunés du canton de Genève? 

 

Le canton de Genève perd de plus en plus de contribuables et depuis 2010, 35 résidents qui versent plus d’un million de CHF d’impôts annuellement sont partis. Les fiscalistes estiment que ces départs sont expliqués par la forte imposition de l’impôt sur la fortune.

Le canton compte 300 contribuables des plus importants et 35 ont déjà quitté les lieux entre 2010 et 2018 pour s’installer dans d’autres cantons ou en Grande-Bretagne.

Ces grosses fortunes, qui ont fui le canton de Genève, ont versé entre 2010 et 2015 un million de CHF par an en différents impôts notamment l’impôt cantonal et communal sur le revenu et la fortune, en plus de l’impôt fédéral direct et de l’impôt immobilier complémentaire.

Ces contribuables sont partis s’installer vers d’autres cantons suisses plus favorables en matière d’imposition, ainsi que vers les États-Unis et la Grande-Bretagne. Cette dernière constitue la principale origine des plus gros contribuables qui s’installent à Genève.

La fuite des plus grosses fortunes genevoises

Les données chiffrées du Département des finances excluent les forfaits fiscaux en faveur des étrangers ne travaillant pas en Suisse. Ces mêmes chiffres soulignent qu’au cours de la période allant de 2010 et 2018, le nombre de départs des fortunés s’élève à 69 alors que le nombre des arrivées ne dépasse pas 34. L’exode concerne 11,6% des contribuables les plus fortunés de Genève. Autrement dit, ce sont quelques dizaines de millions de CHF de recettes fiscales qui sont perdues pour le canton de Genève.

Imposition sur la fortune devenue insoutenable

Les spécialistes estiment que cette fuite des plus grosses fortunes s’explique par l’impôt sur la fortune qui se révèle insupportable dans certains cas. Surtout, lorsque l’administration fiscale réévalue à la hausse la valeur des sociétés non cotées. Dès lors, les personnes qui réinvestissent dans leurs propres structures se trouvent pénalisées.

Les choses se sont aggravées avec la circulaire n° 28 de la Conférence Suisse des Impôts (ci-après Circulaire CSI 28) qui impose la méthode des praticiens pour l’évaluation des actions des sociétés non cotées. Cette méthode est adoptée par les Administrations fiscales cantonales et fédérales pour calculer la valeur des actions qui sera soumise à l’impôt sur la fortune. Or, les estimations découlant de cette méthode sont très exagérées.

À partir du 1er janvier 2021, les règles ont été modifiées afin de tenir compte du facteur d’« illiquidité » des titres non cotés. Les autorités fiscales suisses ont récemment estimé que la valeur d’une société, dont les titres ne sont pas ou très peu échangés sur le marché, devait être inférieure à une société similaire dont les titres sont davantage proposés sur le marché. Elles ont donc introduit, une majoration de 17,65% du taux de capitalisation (7% actuellement), lorsque le degré de cessibilité des titres d’une société est nul ou faible. Les autorités fiscales suisses parlent à cet égard de sociétés «illiquides».

Voici un exemple pour un actionnaire-entrepreneur domicilié en Ville de Genève avec sa société également basée dans le canton de Vaud :
Valeur de substance de la période N    CHF    1'000'000.-
Bénéfice de l’exercice N-2    CHF    500'000.-
Bénéfice de l’exercice N-1    CHF    1'500'000.-
Bénéfice de l’exercice N    CHF    1'000'000.-
Taux de capitalisation standard selon la Circulaire CSI 28        7%
Taux de capitalisation après prise en compte du facteur d’illiquidité        8.2355%
Valeur de la société selon la règle standard    CHF    9'857'143.-
Impôt sur la fortune (0.8%, taux max VD)    CHF    78'857.-
Valeur de la société selon les nouvelles règles    CHF    8'428'369.-
Impôt sur la fortune (0.8%, taux max VD)    CHF    67'427.-
Economie d’impôt    CHF    11'430.-

En appliquant ce facteur d’illiquidité, on peut constater une économie fiscale de l’ordre de 
CHF 11'430.-.

En fonction des pratiques cantonales, cette modification sera applicable à partir de 2021 ou 2022. En ce qui concerne le canton de Vaud, elle sera applicable dès 2021.


Qui est tenté par l’exil fiscal?

Deux types de contribuables fortunés sont les plus tentés par la fuite, à savoir les familles fortunées trouvant que le climat fiscal est défavorable et qui ressentent de l’insécurité étant donné qu’il devient difficile de construire quelque chose.

Et puis, il y a les traders russes qui opéraient dans les matières premières depuis quelques temps mais qui trouvent que la Suisse a perdu de son attractivité. 29% de ces fortunés partent vers la Grande-Bretagne, alors que 25% privilégient les autres cantons suisses, tandis que 17% se dirigent vers les États-Unis. Puis en dernière position, on trouve Monaco et les Émirats Arabes Unis.

Les spécialistes trouvent que d’autres destinations émergent comme la France et l’Italie qui sont plus attractives que Genève. Les deux pays ont abrogé l’impôt sur la fortune, même si la France a gardé l’impôt sur le patrimoine immobilier (IFI).

Toutefois, la situation fiscale en France dépendant du contexte social et de la politique menée par le Président Macron et son Premier Ministre, peut changer rapidement au gré de la grogne populaire.  
Ceci dit, la situation n’est pas aussi sombre car certaines fortunes s’installent dans le canton de Genève dont 47% en provenance de Grande-Bretagne, alors que les autres cantons fournissent 18%, suivis de la France et des États-Unis.

Une bonne partie de ces nouveaux arrivants sont des traders de matières premières qui s’installent à proximité des géants du secteur où ils opèrent. Les revenus de ces arrivants se situent aux alentours de deux à trois millions de CHF par an.

Qu’en est-il des cantons suisses ?

Pour les fortunés qui préfèrent aller vers les autres cantons, généralement ils choisissent Schwyz, Zoug, Berne ou le Valais. Cependant, ils trouvent le canton de Vaud peu attractif étant donné qu’il adopte la même imposition que Genève en plus d’un impôt sur les successions.

Mais le plus marquant est qu’on ne sait pas si Vaud est marqué par le même phénomène de fuite des contribuables fortunés à l’instar de Genève. L’administration cantonale des impôts déclare qu’elle ne dispose pas de statistiques sur le sujet.

Pour la réduction d'impôts

Les statistiques révélant les fortunes, qui désertent de Genève vers d’autres destination, ont donné l’alerte et de plus en plus de personnes militent pour l’abolition ou la réduction de l’impôt sur la fortune qui pénalise les fortunes dans les cantons de Genève et Vaud.

De plus, tout le monde est en attente de la réforme du régime d’impôt des entreprises (RIE 3) qui tarde à accoucher et qui est toujours en attente de votation après que la première version du texte ait été balayée par le peuple.

La conseillère d’Etat en charge des finances, Nathalie Fontanet, se dit pour un changement étant donné que Genève est en surexploitation de son potentiel fiscal. Tout le monde est en attente de la réforme de l’imposition des entreprises dans l’espoir de réviser à la baisse le taux de l’impôt sur la fortune.

Pour votre formation en comptabilité, orientez-vous vers un cours en ligne vous permettant de concilier vie privée et vie professionnelle tout en réussissant votre formation au rythme désiré.

Source : Journal Le Temps

Préparez votre Brevet Fédéral en finance et comptabilité

Et obtenez le titre de « Spécialiste en finance et comptabilité avec Brevet fédéral

Découvrir la formation Betterstudy pour le Brevet fédéral de  Spécialiste en finance et comptabilité
avatar

Christophe Rieder

Titulaire d'un Master of Science HES-SO in Business Administration obtenu à HEG-Fribourg et du Diplôme fédéral d'Enseignant de la formation professionnelle, Christophe Rieder est le Fondateur et Directeur de l'institut de formation professionnelle en ligne BetterStudy. Christophe est aussi Maître d'enseignement en gestion d'entreprise à l'Ecole supérieure de commerce. Avant de se réorienter dans le domaine de la formation, Christophe a travaillé 4 ans dans la gestion de fortune à Genève. Pendant son temps libre, Christophe fait de la guitare et joue aux échecs, il aime aussi voyager.