Christophe Rieder 11 août 2018 17:16:33

Il ne suffit pas d’acquérir une start-up pour devenir une entreprise innovante

Business Management & Entrepreneuriat

Investir dans une start-up est devenu au cours de ces dernières années un business florissant, mais ce n’est pas la garantie du succès ni de la possession d’une structure innovante. Acquérir une entreprise innovante implique la prise en considération de son activité, sa culture et l’implication de ses équipes, entre autres facteurs déterminants.

Les opérations d’acquisition et de fusion les plus importantes de par le monde, ont été entreprises dans le but d’accéder à l’innovation. C’est la principale raison qui supplante même la conquête de nouveaux marchés, l’accès à de nouveaux créneaux de distribution, le développement de l’activité dans différentes zones du globe, etc.. En 2016 pas moins de 291 milliards de dollars ont été investis dans des transactions d’acquisition à l’échelle mondiale, alors que ce montant ne dépassait guère les 72 milliards en 2012. Cette évolution remarquable s’explique par le besoin urgent d’investir dans l’innovation technologique, surtout dans un contexte macroéconomique favorisant ce type de transactions, doublé d’une forte émergence de fonds de corporate venture capital dont le nombre a doublé au cours de la dernière décennie, notamment aux Etats-Unis.

Pour ce qui est de la France, la tendance présente la même dynamique avec les plus importants groupe de l’hexagone qui ont monté leurs propres fonds d’une valeur de de 100 millions d’euros chacun. La raison est que ces géants de l’économie française cherchent à dénicher les bons filons pour investir dans des structures de plus petite taille mais avec d’importantes promesses d’innovations et qui sont propices à l’expérimentation de nouveaux concepts et de nouveaux projets.

L’acquisition et fusion, quels enjeux?

L’acquisition n’est pas un objectif en soi, c'est plutôt l’innovation qui constitue un élément stratégique. C’est pourquoi il faut la préserver, puis veiller à la développer de telle façon à réaliser les synergies prévues et à obtenir le retour d’investissement escompté par les porteurs de parts.

Acquérir une entreprise innovante présente de nombreux risques pour l’acquéreur, mais également des intérêts et des enjeux stratégiques à commencer par l’obtention d’une technologie qui ne peut être développée en interne. En plus un tel choix assure l’accélération du processus de maîtrise de technologie, ce qui permet de dépasser ou de contourner tous les retards cumulés au niveau de R&D et avoir, par la même occasion, une avance sur les concurrents.

Il est possible que l’acquisition ou la fusion soit entreprise pour prévenir un concurrent potentiel susceptible de constituer une menace dans l’avenir. De même qu’il peut s’agir d’une opportunité de développer des synergies notamment dans le cadre d’activités croisées. D’ailleurs il est très courant de voir ce type de transactions dans le domaine des applications multisectorielles.

L’investissement en technologie est une façon de communiquer à ses partenaires financiers et actionnaires le tournant franchi par l’entreprise. C’est aussi une occasion pour introduire un savoir, une technologie ou même des compétences à l’entreprise à la suite d’une collaboration avec une autre structure à l’instar d’une start-up.

D’autres raisons peuvent justifier une opération d’acquisition ou de fusion mais globalement il s’agit de motivations stratégiques notamment pour posséder un savoir ou une technologie.

Il convient de noter que de plus en plus de transactions du genre sont validées de par leur importance stratégique mais aussi financière. En fait de nombreux actionnaires et investisseurs y trouvent leur compte.

Les potentialités d’une opération d’acquisition

Le plus marquant dans une opération d’acquisition, malgré son importance stratégique, est que les acquéreurs ne sont généralement conscients qu’après coup de toutes les potentialités et tous les intérêts pour les deux structures. Dans certains cas, il a fallu attendre la finalisation de la transaction pour se rendre compte des possibilités de développement d’une technologie ou d’une prestation. L’un des exemples à citer est celui de LinkedIn qui a été acquis en 2016 par Microsoft pour la valeur de 26.2 milliards de dollars, mais dont le potentiel n’a été clairement perceptible qu’après la fin de la transaction. Chose qui a permis de fixer par la suite, l’objectif de rendre LinkedIn le leader des services en ligne pour les professionnels et les entreprises.

Malgré son intérêt indéniable, l’opération de rachat d’une structure par une autre présente certains défis. Il s’agit notamment de la démarche à suivre pour garantir la préservation, le développement et la diffusion de l’innovation dans la structure absorbée. D’après les chiffres annoncés aux Etats-Unis, il s’avère que 76% des dirigeants d’entreprises sont satisfaits des acquisitions d’entités basées sur l’innovation. Mais un tel succès doit être relativisé étant donné que la satisfaction de la direction n’est pas synonyme la satisfaction de l’ensemble des acteurs d’une entreprise et à tous les niveaux, d’où la nécessité de bien préparer la démarche.

La réussite passe par la préparation de l’intégration

L’intégration est d’une grande importance pour le succès de toute acquisition notamment pour la structure absorbante. Une démarche qui doit être judicieusement préparée, avec l’implication des responsables opérationnels en premier lieu. C’est la garantie de la validation de la motivation stratégique surtout des experts technologiques. C’est essentiel surtout si l’innovation est l’enjeu de cette opération.

Il ne faut pas négliger l’aspect culturel, considéré souvent comme une dimension secondaire, alors qu’il peut être décisif pour la réussite de toute opération tournée innovation. Il va sans dire que la fusion de deux entités différentes implique le rapprochement de leurs différences culturelles en vue de réussir l’intégration opérationnelle des équipes de travail.

Pouvoir garder les compétences humaines après la finalisation de la transaction d’acquisition revêt une grande importance, surtout si l’écart entre la taille des deux entités est significatif. Si l’opération n’est pas bien menée, il y a grand risque d’échouer à retenir une main-d’œuvre de valeur et dans ce cas l’acquéreur se trouvera avec une entité sans compétences. D’où la nécessité de mettre en place un dispositif d’intégration avec à la clé des rémunérations incitatives, un environnement de travail valorisant et un suivi régulier. Le but est de préserver les bons éléments qui ont une grande connaissance en innovation, notamment pour dépasser le cap de l’intégration.

L’innovation au service du développement

Le domaine banquier a connu une grande révolution technologique au cours des dernières années, ce qui a obligé plusieurs établissements bancaires à réaliser des transactions tournées vers l’innovation. En effet, les structures FinTech ont chamboulé les modèles classiques dominant le secteur, pour adopter des technologies plus avancées comme la blockchain et les data analytics. La raison de cette révolution dans le domaine bancaire est le croisement de ce dernier avec d’autres secteurs d’activité à l’instar des télécommunications et de l’informatique.

Un exemple qui illustre ce type d’interactions innovantes est l’acquisition en 2015 de LoopPay, pionnier des paiements sans contact et mobiles, par le géant coréen Samsung Electronics. Le but est de concurrencer ApplePay avec le service SamsungPay. Une initiative qui prouve que les plus grands groupes internationaux veillent à diversifier leurs offres en franchissant les frontières sectorielles en vue de générer de nouveaux relais de croissance. Un défi qui n’est pas réservé au secteur de la banque ou de l’assurance mais qui s’étend aux autres domaines pour créer des synergies et de nouvelles lignes d’activité.

Cette démarche ne peut être improvisée, c’est tout le contraire, car il faut avoir une vision s’inscrivant sur le moyen et long terme, en vue d’anticiper les besoins futurs des clients. Il faut donc définir des offres et stratégies commerciales innovantes, partager des portefeuilles clients et développer de nouvelles méthodes de communication, le tout en combinant les efforts de la structure acquéreuse et celle acquise. L’objectif est de fusionner les efforts et de se développer ensemble.

Nouvelle mission pour les départements M&A

L’acquisition centrée sur l’innovation s’inscrit dans un besoin de croissance externe, ce qui implique de définir la mission ou le rôle des départements M&A des entreprises acquéreuses et même des fonds de corporate ventures. Une grande mutation est observée à ce niveau à la suite du développement intense des investissements dans le domaine de l’innovation.

Les départements M&A et les CVC jouent un rôle primordial dans les opérations d’acquisition car ils doivent démontrer, si nécessaire, qu’opter pour la croissance externe est un choix stratégique qui n’émane pas de l’incapacité de l’entreprise à innover. Ils ont également la charge de valider un tel choix dans un contexte économique incertain et dans lequel l’entreprise doit se positionner pour conquérir de nouveaux marchés et acquérir des technologies innovantes. Les M&A et les CVC ont pour mission aussi de valoriser financièrement l’innovation, notamment dans des marchés émergents qui ne sont pas bien évalués ; comme ils doivent croiser les divers secteurs susceptibles de présenter des synergies technologiques.

 

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Christophe Rieder

Titulaire d'un Master of Science HES-SO in Business Administration obtenu à HEG-Fribourg et du Diplôme fédéral d'Enseignant de la formation professionnelle, Christophe Rieder est le Fondateur et Directeur de l'institut de formation professionnelle en ligne BetterStudy. Christophe est aussi Maître d'enseignement en gestion d'entreprise à l'Ecole supérieure de commerce. Avant de se réorienter dans le domaine de la formation, Christophe a travaillé 4 ans dans la gestion de fortune à Genève. Pendant son temps libre, Christophe fait de la guitare et joue aux échecs, il aime aussi voyager.